Urs Furrer est directeur de l’Union suisse des arts et métiers (usam) depuis le 1er mai. Treize jours après son entrée en fonction, il a participé à l’Assemblée des délégués de l’Union neuchâteloise des arts & métiers (UNAM) au Grand Hôtel Les Endroits à La Chaux-de-Fonds. Entretien.
Urs Furrer, avant de devenir directeur de l’usam, quel a été votre parcours ? Qu’est-ce qui vous a motivé à reprendre les rênes de la faîtière des arts et métiers ?
Au cours des vingt dernières années, j’ai travaillé pour différentes organisations économiques, les dix dernières notamment en qualité de directeur des associations de fabricants de chocolat et de produits de biscuiterie. Auparavant, j’avais conseillé des entreprises de différentes branches en tant qu’avocat d’affaires. Au fil de toutes ces années, j’ai pu constater à quel point les travaux et coûts improductifs pèsent de plus en plus lourdement sur les PME, en raison de l’augmentation constante de la bureaucratie. L’usam est le principal acteur en Suisse capable de stopper cette évolution. En outre, les arts et métiers forment le personnel qualifié dont notre pays a besoin. L’usam est aussi la voix la plus importante de ce pays pour promouvoir l’apprentissage. Voilà ce qui m’a motivé à reprendre la direction de l’usam.
La crédibilité de l’économie et des associations vous tient particulièrement à cœur ? Pour quelles raisons ?
Je reprends la direction de l’usam à un moment où les les organisations économiques n’ont pas bonne réputation auprès d’une partie de la population. On entend souvent dire que l’économie a perdu en crédibilité et en confiance. Nous avons là un énorme défi à relever. Car sans la confiance des citoyennes et citoyens, nous perdons des votations importantes dans les urnes. Notre économie ne peut pas se le permettre, et notre pays ne peut pas se le permettre.
Mais ce défi pour l’économie est une chance pour l’usam. Car l’économie, ce ne sont pas seulement les grands groupes et leurs associations et managers qui, par le passé, ont fait des gros titres négatifs dans la presse et qui sont la raison pour laquelle l’économie a perdu la confiance et le respect de la population. L’économie, ce sont les entrepreneuses et entrepreneurs, artisanes et artisans qui représentent 99% des entreprises suisses, et qui sont ancrés dans la société, dans les villages, dans les villes, dans les associations et dans les fonctions politiques. Lorsque les électeurs penseront à nouveau davantage à nos PME, à notre artisanat et à nos nombreuses entreprises familiales, lorsqu’ils entendront le mot «économie», la confiance de la population dans l’économie sera alors à nouveau plus grande. J’en suis convaincu. Il importe que l’on continue à bien entendre ces voix, celles des organisations cantonales, celles des associations professionnelles et celle de l’usam lors des campagnes de votation.
Comment l’économie peut mener ces campagnes avec succès ?
Il faut aussi des alliés. Entretenir une bonne collaboration avec d’autres associations est central. La campagne «Perspective Suisse», lancée l’année dernière, est une bonne base pour établir une collaboration constructive entre associations.
Comme mentionné plus haut, pour que nous soyons aussi en mesure de mener une campagne de manière autonome, nous avons besoin d’une bonne collaboration avec nos points d’appui locaux, c’est-à-dire avec nos unions cantonales des arts et métiers. Ce lien étroit entre les unions cantonales des arts et métiers et l’usam est un avantage que nous devons absolument cultiver.
Avez-vous un exemple de campagne qui illustre cette nécessaire collaboration entre l’usam et ses unions cantonales ?
Cette année encore – probablement en novembre – nous serons appelés à nous prononcer sur l’aménagement des routes nationales. L’usam est à la tête de la campagne en faveur du projet. La votation sur les routes nationales est importante car son acceptation serait un excellent signal pour d’autres projets d’infrastructures.
Jusqu’ici, l’usam n’a pas eu peur de lancer des référendums. En sera-t-il encore ainsi à l’avenir ?
La capacité à mener un référendum est importante pour notre travail de lobbying au quotidien. Il est crucial que l’usam puisse elle-même lancer des référendums. Autrement dit, qu’elle soit prête à dire « Stop, maintenant ça suffit, sinon nous allons récolter des signatures». Cette disponibilité permanente de l’usam se répercute aussi sur notre travail avec le Parlement.
Quels sont les autres chevaux de bataille de l’usam pour ces prochaines années ?
J’en vois trois. D’abord, la lutte systématique contre la bureaucratie et la surréglementation. Il s’agit d’un domaine clé de l’usam. Ensuite, la politique de la formation. L’usam entend rester l’organisation économique de référence en la matière. Nos PME veillent à ce que soient formés les professionnels dont nous avons besoin. Nous ne résoudrons pas la pénurie de main-d’œuvre qualifiée avec des diplômés universitaires qui ne trouvent pas d’emploi. Ce dont nous avons besoin, ce sont de jeunes femmes et de jeunes hommes motivés ayant terminé leur apprentissage, que nous pouvons engager dans nos entreprises. L’apprentissage est la réponse des PME au problème de la pénurie de main-d’œuvre qualifiée.
Enfin, la politique énergétique est un dossier sur lequel nous devons mettre encore plus l’accent. Il est inadmissible que notre pays ne soit pas en mesure de produire suffisamment d’énergie à des prix abordables. L’usam soutient la loi sur l’électricité visant à un approvisionnement en électricité sûr avec des énergies renouvelables, objet de vote du 9 juin prochain. Il faut que ce projet soit adopté en votation populaire. Mais ne nous faisons pas d’illusions. Nous devrons encore développer les énergies de manière globale. Nous ne devons pas nous laisser limiter par des interdictions en matière de technologie. Sinon, nous n’aurons à long terme ni un approvisionnement énergétique durable ni un approvisionnement énergétique sûr. Il ne s’agit pas seulement d’un défi, mais également d’une chance pour nos PME et pour l’usam. Grâce à leur savoir-faire, nos PME peuvent en effet contribuer de manière décisive au développement durable de l’approvisionnement énergétique.
Par la voix de son président Fabio Regazzi, l’usam s’est déclarée prête à faire des compromis sur le dossier européen ? De quels compromis s’agit-il ? Et comment s’y prendra l’usam pour faire avancer le dossier européen ?
L’usam évaluera le résultat des négociations lorsque celles-ci seront terminées. Nous évaluerons alors les avantages et les inconvénients de ce qui a été négocié. L’examen de compromis est, par exemple, envisageable en ce qui concerne le délai d’annonce préalable pour les entreprises étrangères qui souhaitent exécuter des mandats en Suisse. À condition cependant qu’avec la numérisation les informations circulent bel et bien suffisamment vite dans la pratique pour empêcher les abus.
Lors du congrès de l’usam, vous avez déclaré que vous feriez un grand Tour de Suisse. En quoi consistera-t-il?
En effet, je souhaite rencontrer de nombreuses organisations membres de l’usam. Et en particulier les unions cantonales des arts et métiers. Elles constituent une assise importante de l’usam, puisqu’elles assurent l’ancrage de notre organisation dans les cantons. Je souhaite les écouter, car je veux connaître leurs préoccupations.
Pour terminer notre entretien, que connaissez vous du Canton de Neuchâtel?
Il y a plus de trente ans, lorsque j’étais collégien, j’ai travaillé dans la vente dans un grand magasin en ville de Neuchâtel, durant les vacances d’été. J’en garde d’excellents souvenirs. Je reviens toujours avec grand plaisir dans le canton de Neuchâtel, qui offre de magnifiques buts d’excursions. Une randonnée au Creux du Van, par exemple, est l’une des plus spectaculaires que l’on puisse faire en Suisse. J’étais invité récemment à l’Assemblée des délégués de l’UNAM à La-Chaux-de-Fonds. Je suis impressionné par les activités que déploie l’UNAM, entre autres dans le domaine de la formation professionnelle. Je connais le président de l’UNAM, Damien Cottier, depuis très longtemps : nous avons travaillé ensemble chez economiesuisse. Et dans ma nouvelle fonction de directeur de l’usam, je travaille en étroite collaboration avec Pierre-Daniel Senn, membre du Comité de l’UNAM, qui siège également au Comité directeur de l’usam.